Arizona Tribune - En Occitanie, le ras-le-bol agricole mobilise tous azimuts et se poursuit

"C'est surtout un problème de revenus, en Occitanie, les agriculteurs ont les revenus parmi les plus bas de France", a déclaré à l'AFP Alain Iches, président de la chambre d'agriculture du Tarn-et-Garonne, pour expliquer l'intensité de la mobilisation dans la région.

Lundi, pour la cinquième journée consécutive, l'A64 entre Toulouse et Bayonne est coupée à la circulation, au niveau de Carbonne (Haute-Garonne) à 45 km au sud de Toulouse, et devrait le rester mardi.

Les automobilistes circulant sur cet axe doivent le quitter avant le barrage d'une quarantaine de tracteurs, pour reprendre l'autoroute un peu plus loin.

Un message écrit pour "intimider" les agriculteurs a été retrouvé sur place et remis aux gendarmes, selon Jérôme Bayle, éleveur bovin, présent sur le barrage, qui a évoqué un "incendie criminel".

L'Occitanie "est une région qui a fait le choix de la qualité, les agriculteurs se sont adaptés, certains sont partis vers des productions bio à la demande du consommateur et aujourd'hui, les productions bio, notamment le blé, sont payées encore moins cher que les productions conventionnelles", a regretté Luc Mesbah, secrétaire général de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA) de Haute-Garonne.

- Détresse agricole -

"On peut pas continuer comme ça", a-t-il dit à l'AFP, à quelques mètres du barrage où les agriculteurs mobilisés se réchauffent dans le froid vif près d'un brasero installé sur le terre-plain central de l'autoroute.

"On est sur la quatrième ville de France (Toulouse), et on a de grosses centrales d'achat qui distribuent sur l'ensemble de l'Occitanie. Elles seront la cible, demain (mardi), d'actions de blocage", a-t-il prévenu. Un blocage est par exemple prévu sur l'A61 (Toulouse-Narbonne) "au niveau de la plateforme de Lidl", selon un appel à mobilisation envoyé à l'AFP.

Dans le Tarn-et-Garonne, les points d'accès à la centrale de Golfech, qui alimente en électricité le bassin toulousain, sont également bloqués par une cinquantaine de tracteurs.

Néanmoins, "le personnel nécessaire au fonctionnement de la centrale est en poste et a pu accéder au site", selon un porte-parole d'EDF.

La préfecture a aussi signalé des blocages sur deux échangeurs, à hauteur de Saint-Loup et de Castelsarrasin, sur l'A62 reliant Toulouse et Bordeaux.

"Notre objectif est de faire plier le gouvernement", a expliqué Jean-Baptiste (BIEN : Jean-Baptiste) Gibert, président local des Jeunes agriculteurs (JA), ajoutant: "On se retrouve à crever la dalle comme des chiens au bord de la route et dans nos champs. On en a marre!".

Un agriculteur bio sur l'un des blocages de Golfech témoigne également: "A force de vouloir pousser les agriculteurs à passer en bio et à importer du bio, maintenant il y a surproduction parce qu'il n'y a plus d'acheteurs en face", a raconté à l'AFP Christian Couderc, agriculteur de 55 ans à Touffailles (Tarn-et-Garonne).

"Je suis obligé de passer en conventionnel", a-t-il déploré, ajoutant, la voix brisée : "J'ai été en bio dès le début en 2001, mon père et mon grand-père l'étaient avant. Pour moi, c'est un échec et c'est très difficile à accepter".

- Première région bio -

L'Occitanie, première région bio de France, subit en effet de plein fouet la crise du secteur, et avec Provence-Alpes-Côte d'Azur elle est également, selon les agriculteurs, celle qui subit le plus fortement le changement climatique.

C'est notamment le cas dans les Pyrénées-Orientales, importante zone de production de fruits et légumes, durement touchée par la sécheresse depuis deux ans, et concernée par une manifestation sur l'autoroute A9.

Juste avant midi, des dizaines de manifestants ont ainsi occupé un moment les voies dans le sens Montpellier-Barcelone au niveau du péage Perpignan-sud, interrompant temporairement le trafic.

Enfin, dans les Hautes-Pyrénées, des perturbations sont signalées sur l'A64, du côté de Lannemezan et Tarbes. Dans l'Ariège, la RN20, qui relie Toulouse à l'Andorre, était fermée dans l'après-midi à hauteur de Pamiers.

Dans l'après-midi, la présidente de la région Occitanie, Carole Delga (PS), devait aller à la rencontre des agriculteurs près de Carbonne.

Th.Gonzalez--AT